jeudi, décembre 02, 2010

Dette publique : spéculation or not spéculation ?

Dette publique : spéculation or not spéculation ? - Coulisses de Bruxelles, UE
Dette publique : spéculation or not spéculation ?
de Jean Quatremaire     liberation.fr  blogs coulisses de Bruxelles   20101129
Un petit complément à mon article de samedi sur le jeu des banques et autres institutions financières de la zone euro.

DSC08525 Il faut bien voir qu’une partie d’entre elles n’a pas d’autre choix que de vendre les obligations de certains pays et qu’il ne s’agit aucunement de spéculation. En effet, les règles prudentielles les obligent à avoir en portefeuille, en fonds propres, des emprunts d’État très bien notés afin qu’elles disposent d’un matelas solide. Le problème est que, lorsque les agences de notation (les trois principales sont anglo-saxonnes et deux d’entre elles sont possédées par des fonds d’investissement américains qui sont aussi actionnaires de banques d’affaires comme Goldman Sachs) dégradent la note souveraine d’un pays, ces institutions sont obligées de vendre, ce qui n’a strictement aucun sens dès lors qu’il s’agit des obligations des pays de la zone euro.

En clair, on donne un pouvoir disproportionné, la possibilité de pousser à la faillite des États, à des agences dont la neutralité est tout sauf certaine (comme l’ont montré les subprimes notées triple A, la note maximale, ce qui était dans l’intérêt des actionnaires desdites agences). La Banque centrale européenne l’a fort bien compris et, au plus fort de la crise grecque, elle a décidé d’accepter en garantie toutes les obligations de la zone euro même dégradées.

Donc ce qui peut apparaître comme de la spéculation contre la dette souveraine de la part des établissements financiers européens n’est que la résultante d’une réglementation inadaptée, mais qui fait le jeu des vrais spéculateurs. Ceux-ci, comme Goldman Sachs et consorts, n’ont d’ailleurs même pas besoin de posséder ou de vendre réellement de la dette souveraine des États membres de la zone euro. D’ailleurs, comme les mouvements actuels sur ce marché sont quasiment inexistants, on peut légitimement penser que la spéculation qui vise à faire baisser les prix des obligations se fait uniquement par le biais des ventes à découvert à nue.

En clair, les spéculateurs parient à la baisse sans détenir le moindre titre (cela s’appelle être short). Et si leur pari se réalise, ce qui est sans risque en ce moment, ils décrochent la timbale, et ce, sans jamais avoir besoin d’acheter effectivement les titres avec lesquels ils ont joué… C’est pour cela que l’Allemagne, au printemps dernier, a interdit les ventes à découvert à nue sur son territoire.

Autrement dit, les instruments de la spéculation sont connus. La BCE dans un cas, l’Allemagne dans l’autre, ont tenté de les brider. On se demande dès lors pourquoi l’Union dans son ensemble ne décide de mettre une poignée de sable dans les rouages pour au moins la brider.


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